Le sport et l’art d’aller de l’avant

(Par Chantal Laframboise Fox – Patrimoine canadien) Après avoir vaincu le cancer deux fois en moins de cinq ans, ma mère a contracté le Staphylococcus aureus résistant à la méthicilline (SARM) pendant qu’elle était à l’hôpital pour ce qui devait être une simple chirurgie. Elle devait sortir le lendemain mais, au lieu de cela, elle a passé 85 jours à l’hôpital, dans trois institutions, la plupart du temps en isolement.
(Photo by Chantal Laframboise Fox)

(Photo par Chantal Laframboise Fox)

Dans un dernier effort désespéré pour débarrasser son corps du SARM, ses médecins ont conclu qu’il fallait lui retirer sa hanche artificielle. Étant donné le type d’appareil artificiel qu’elle avait, cela impliquait que la moitié supérieure de son fémur gauche devait aussi être enlevée. Nous l’avons ramenée à la maison à temps pour Noël cette année‑là. Elle avait perdu la moitié de ses cheveux, et avait une perfusion de vancomycine dans le bras qui durait 24 heures et qui nécessitait qu’une infirmière vienne à la maison un jour sur deux. Ma mère était épuisée, mais elle s’efforçait de rester positive. Par moments, quand les larmes lui montaient aux yeux, elle avouait que ce qui la décevait le plus, c’est qu’elle avait toujours espéré pratiquer la danse une fois à la retraite. Une grande partie de son rétablissement a consisté à apprendre à se débrouiller et à s’adapter à sa nouvelle vie ainsi qu’aux difficultés qu’elle comportait. Elle avait 65 ans. Lorsqu’elle a retrouvé suffisamment d’énergie pour sortir de la maison, ma mère a découvert un centre pour personnes âgées près de chez elle. Entre autres choses, elle a décidé de s’adonner à la sculpture sur bois pour la première fois de sa vie, et elle aimait ses sorties hebdomadaires. Par un heureux hasard, l’un des hommes de son groupe de sculpture sur bois était « câleur » dans une troupe de danse carrée en fauteuil roulant, et il l’a invitée à essayer. Elle s’est retrouvée à faire quelque chose qu’elle n’espérait plus pouvoir faire : danser! En plus des pratiques hebdomadaires, le groupe faisait des démonstrations publiques et a même voyagé à travers le comté pour participer à un festival de danse où il a été très bien reçu. Et surtout, en faisant partie du groupe, elle a eu l’occasion de rencontrer des gens qui avaient fait face à des problèmes semblables aux siens, et elle y a trouvé du réconfort. C’est un membre de la troupe qui a parlé à ma mère du Steadward Centre for Personal and Physical Achievement à l’Université de l’Alberta et qui lui a suggéré de s’inscrire à la liste d’attente pour profiter de ses programmes. Ma mère, qui était maintenant dans la fin de la soixantaine, a commencé à participer avec d’autres à un programme de natation une fois par semaine. Puis elle a été acceptée dans un programme d’entraînement en circuit dans un gymnase. Elle a ainsi pu commencer à travailler pour augmenter sa force, son équilibre et sa confiance en soi. C’est grâce à une nouvelle amitié nouée au Steadward Centre que ma mère a découvert . Son amour pour ce sport et le groupe a été instantané : la camaraderie, le soutien, l’accent mis sur les capacités, la compétition, le plaisir. Elle jouait avec enthousiasme et elle a rapidement fait des progrès dans son équipe. Ces jours‑ci, ma mère est toujours en déplacement. J’adore entendre parler de ses aventures. Elle participe régulièrement à des tournois et à des bonspiels, et elle est sur la piste plusieurs fois par semaine. D’autres équipes l’ont invitée à être réserviste, elle a pris part à deux épreuves internationales de curling en fauteuil roulant, elle a affronté des équipes d’athlètes qui n’étaient pas en fauteuil roulant, et elle participe chaque année aux épreuves provinciales de curling en fauteuil roulant. L’été dernier, elle a fait un voyage en voiture pour jouer en double à Calgary, et c’est un partenaire paraplégique de curling qui conduisait. Oui, le SARM a changé sa vie pour toujours. Oui, il y a des choses qui sont difficiles pour elle maintenant; mais ce qu’il faut retenir, c’est qu’elle a développé ses capacités. Le sport a aidé ma mère à briller. Elle est un membre utile d’une équipe. Elle exerce ses compétences en leadership. Elle a saisi de nouvelles occasions, a voyagé, a rencontré des gens merveilleux, s’est fait de bons amis et se sent utile. Elle motive les autres, et les autres la motivent. Et le plus important, c’est qu’elle y prend beaucoup de plaisir! Ma mère a perdu une partie d’un os et la capacité de marcher, mais elle n’a pas perdu le moral ni son dynamisme.
(Photo by Chantal Laframboise Fox)

(Photo par Chantal Laframboise Fox)