Qui ne risque rien n’a rien

Au moment d’écrire ces quelques lignes s’amorcent, au club de curling de Kénogami, dans la belle région du lac St-Jean, les Championnats provinciaux masculins et féminins de curling. Ces championnats couronneront les deux équipes qui représenteront le Québec aux Tournois des cœurs Scotties et au Brier Tim Horton, qui auront lieu respectivement à Red Deer et Saskatoon, en février et mars prochain. Deux changements majeurs sont à souligner lors de l’édition 2012 de ces deux championnats. Tout d’abord, la formule utilisée lors de la compétition est « dramaticalement » changée, surtout en ce qui concerne la ronde préliminaire. Depuis des décennies, les rondes préliminaires étaient constituées d’un tournoi à la ronde entre les diverses équipes qualifiées. Ce tournoi à la ronde permettait de déterminer les équipes qui participaient à la seconde phase. Dorénavant, Curling Québec a opté pour une formule triple Knock out. Bien que je sois loin d’être un partisan de cette nouvelle formule, je n’élaborerai pas trop sur le sujet puisqu’à mon avis, des changements encore plus importants viennent cette année perturber ces championnats et méritent d’être analysés plus en profondeur. Depuis le début des années 2000, les Championnats provinciaux de curling masculins et féminins étaient disputés dans divers arénas à travers le Québec.  La décision des disputés de ces championnats dans de plus grands amphithéâtres avait été justifiée à l’époque par plusieurs raisons incontournables. On voulait premièrement s’assurer de permettre au curling québécois une plus grande visibilité tant au niveau des médias que des spectateurs.  Les infrastructures des clubs de curling n’offraient malheureusement pas beaucoup d’opportunités aux amateurs de venir assister aux compétitions. Les spectateurs se retrouvaient généralement entassés debout derrière des vitres embuées à tenter tant bien que mal de suivre le jeu et d’encourager leurs équipes favorites. Avec l’émergence des certaines formations et leur succès au niveau canadien, on pense ici aux Jean Michel Ménard, François Roberge, Marie-France Larouche, Ève Bélisle et compagnie, il était rendu évident que les enceintes de curling n’avaient plus d’installations minimum requises pour répondre aux demandes grandissantes de la population. Il faut également souligner  que de tenir ces championnats dans de plus grands amphithéâtres donnait énormément d’envergure à ceux-ci et dressait la table pour établir de meilleurs partenariats avec des commanditaires potentiels. On aurait pu profiter en quelque sorte de cet engouement pour le curling pour faire de ces championnats une source de revenus intéressante pour Curling Québec et ses clubs affiliés. Pour ce qui est des compétiteurs qui participaient à ces différents championnats, le fait de pouvoir jouer dans des arénas signifiait généralement de meilleures conditions de jeu. Les clubs de curling avaient beaucoup de difficulté à offrir des conditions de glace adaptées au curling des années 2000 (glaces rapides et beaucoup d’effets de courbes). Peu importe de quel sport on parle, tout le monde est d’accord pour affirmer que de meilleures conditions de jeu favorisent l’émergence de meilleurs compétiteurs, de meilleures formations. Se faisant, Curling Québec mettait en place une structure lui permettant,  à tout le moins, d’accroître ses chances de voir ses meilleurs représentants possible porter les couleurs du Québec aux championnats canadiens. N’est-ce  pas là en soit un des buts premiers de toutes les fédérations sportives? On pourrait également ajouter à cela que pour les compétiteurs, le fait de jouer dans de plus grands amphithéâtres leur offrait une excellente préparation en vue des championnats subséquents. Entre disputer habituellement la plupart de leurs parties de curling dans un environnement relativement clos, comme celui d’un club de curling, et se retrouver tout à coup au MTS Center de Winnipeg, ou autre, devant 15000 spectateurs, la marche était souvent très haute pour nos représentants. Je veux bien croire que mon engagement dans le sport n’est plus ce qu’elle était il y a quelques années (essayer d’élever des adolescents est incompatible avec tout autre forme d’implication sociale ou sportive…), mais à moins que je ne sois complètement débranché de la réalité, les motivations qui avaient forcé Curling Québec à l’époque de déplacer ces championnats hors des clubs de curling sont encore bien présentes et concrètes. Peut-être même encore  plus avec le phénomène olympique qui, lui, expose de façon exceptionnelle  notre sport à l’ensemble de la population et suscite un intérêt grandissant auprès de celle-ci. Alors, comment expliquer, justifier ce recul important de la part de Curling Québec dans ce dossier? Sans vouloir pour rien au monde mettre en doute le travail qui sera effectué par le comité organisateur des championnats de curling qui ont lieu à Kénogami, le retour des deux championnats majeurs de curling québécois dans des clubs de curling, aussi bien organisés soient-ils, est un manque de respect pour nos compétiteurs élites et un frein majeur à la visibilité et au développement de notre sport en sol québécois. Les hautes instances de Curling Québec justifieront probablement cette décision par le manque d’intérêt de la part des différents clubs de curling du Québec à poser leur candidature en vue de l’obtention des différents championnats, si la Fédération n’optait pas pour ce retour en arrière dans ce dossier. Sur ce point, je me dois leur donner entièrement raison. Dans la structure existante, il était devenu trop contraignant et risqué pour les dirigeants des différents clubs de soumettre leur candidature. La charge de travail et les risques financiers sont sans contredit incomparables entre organiser un championnat dans sa propre enceinte sportive versus tenir ce même championnat dans un plus grand amphithéâtre. Difficile de demander à un président de club de curling, aussi qualifié et généreux de son temps soit-il, de s’improviser du jour au lendemain promoteur d’événements sportifs. Trop facile cependant de jeter le blâme sur les conseils d’administration des clubs de curling du Québec. Rappelons que le Championnat masculin est sans commanditaire majeur depuis beaucoup d’années. Ce qui a pour conséquences de placer les clubs qui seraient possiblement intéressés à tenir ces Championnats dans une situation précaire. On doit organiser de plus gros événements, se sortir de sa zone de confort, tout en prenant un risque financier que la plupart des clubs de curling ne peuvent pas se permettre. Une solution facile serait de voir la Fédération jouer le rôle de promoteur, d’organisateur. Les clubs de curling qui voudraient participer, n’aurait, moyennant une entente pré-établi sur le partage des profils potentiels, qu’à fournir la base de bénévoles indispensable au succès d’un Championnat. Curling Québec pourrait se charger de trouver les commanditaires principaux, provinciaux, régionaux, et locaux, les lieux de compétitions, les amphithéâtres, négocié avec les différentes autorités municipales. Il développerait l’expertise nécessaire et le modèle opératoire deviendrait plus facile d’année en année,  plutôt que de voir un groupe de bénévoles recommencer le même processus encore et encore. Si les autorités de la Fédération n‘ont pas les ressources financières, matérielles ou encore moins au niveau de la main d’œuvre disponible, une autre option qui  mériterais d’être envisager, est celle de faire appel à un promoteur privé qui pourrait jouer le rôle de promoteur. J’ose espérer que cette situation n’est que temporaire et que les autorités de Curling Québec réaliseront l’impact néfaste qu’une telle situation peut avoir sur l’avenir du Curling au Québec.  Je demeure confiant qu’ils en feront une priorité et qu’ils sauront, par eux-mêmes ou avec l’aide d’une firme externe spécialisée dans la tenue d’évènements sportifs, établir un motus operandis (basé sur les belles expériences des années antérieures), assorti inévitablement d’une structure financière adéquate, qui mettra en confiance  les clubs de curling du Québec et donnera le goût à ceux-ci de s’impliquer dans ce magnifique processus de développement que sont les championnats provinciaux. @Hemmingsguy