Le parcours qui mène un joueur de baseball jusqu’aux ligues majeures a des racines dans le curling

Le curling et le baseball sont deux sports qui se jouent différemment, dans des milieux bien différents. Mais Chris Shaw voit pas mal de parallèles entre ces deux sports où il a trouvé plein de succès. Receveur et frappeur qui s’est fait un nom pour la constance de son jeu, il s’est creusé une place dans ce sport suprêmement américain, mais il est arrivé dans les ligues majeures par un chemin bien canadien. Tous les deux sports se pratiquent sur un champ de jeu où le joueur dispose de tout un arsenal de coups possibles. Un joueur de curling peut faire un placement, mettre une garde, geler une pierre ou frapper une pierre adverse; il prend cette décision dans l’appui-pied. En tant que capitaine, Shaw avait la responsabilité non seulement de diriger les coups mais également de s’en tenir à ses décisions et en croire la validité. Et en ce sens, ce n’est pas tellement différent de ce qui se passe chez le frappeur, faisant face au lanceur. «Il fait avoir une bonne dose de confiance en soi et il faut croire en ses habiletés; il n’y a pas de place pour le doute,» a dit Shaw en décrivant le moment de se mettre dans l’appui-pied et préparer son lancer. «Je crois qu’il y a beaucoup de similarité avec le baseball parce qu’on ne peut pas avoir de doute quand on est dans le rectangle du frappeur. Ce n’est pas le moment pour chercher à trouver son élan; il faut se dire que le travail s’est déjà fait dans la cage d’exercice, et il faut être satisfait de sa préparation.» Or, Shaw a vraiment de quoi se réjouir en ce moment. Au sortir de sa saison junior en Division 1 avec les University of Oklahoma Sooners, l’équipe des Baltimore Orioles a sélectionné le receveur winnipégois, 21 ans, en 15e ronde, soit 463e au repêchage global. Shaw a joué à 49 parties, et il a eu le poste de receveur ou de frappeur désigné à 47 de ces parties. Il a décroché six grands chelems cette saison, dont trois réalisés sur quatre parties, atteignant un pourcentage de .406, en faisant marquer 15 coureurs. En plus de tout ce succès sur le plan des statistiques, Shaw se dit fier d’être le premier Manitobain à jouer en Conférence Big 12 de la NCAA. Ce n’est d’ailleurs pas la première fois où le nom de Shaw s’est prononcé dans un repêchage MLB. En fait, c’est la troisième fois. Durant sa 12e année à l’école, Shaw a déménagé à Okotoks, Alta. pour jouer sur l’équipe des Okotoks Dawgs Baseball Academy. Après une saison très réussie avec les Dawgs, les Milwaukee Brewers ont sélectionné Shaw à la 38e ronde du repêchage MLB de 2012. Tout en visant à signer un contrat avec une équipe professionnelle de baseball, Shaw tenait à améliorer ses compétences, mûrir sur le plan personnel, et poursuivre ses études. Shaw a donc déménagé dans le Texas pour jouer pour Midland College et faire des études en commerce et finance. Shaw a joué un rôle de premier plan dans les deux titres régionaux consécutifs décrochés par son équipe durant les deux saisons où il était membre des Chaparrals. Il a également obtenu les mentions All-Region et All-Conference pour toutes les deux saisons. Ce ne fut donc pas surprenant que les ligues majeures s’intéressassent encore une fois à Shaw. Les St. Louis Cardinals ont sélectionné Shaw 435e au repêchage global à la 14e ronde de l’année 2014. Shaw a refusé l’offre et a continué ses études dans le Oklahoma, jouant pour les Sooners. Mais après avoir goûté au niveau le plus élevé de baseball collégial, Shaw a changé de perspective sur ce qu’il ferait si on appelait son nom au repêchage MLB de 2015. Il était prêt à apposer son nom sur un contrat. «C’est un parcours qui s’est déroulé lentement mais sûrement. J’ai investi beaucoup de travail dur, et je ne sais combien d’heures, et il y a eu des écueils en cours de route,» a remarqué Shaw à propos du chemin qui a débouché sur sa troisième sélection au repêchage MLB. «J’ai tiré beaucoup de satisfaction du moment de signer ce contrat, parce que ce n’avait pas été chose facile, mais je ne troquerais contre rien l’expérience que j’ai acquise.» En fait, la sélection à une équipe MLB n’est que le tout premier pas du chemin vers les ligues majeures pour Shaw. Il est bien conscient que le vrai travail commence maintenant, et il s’attend à d’encore plus grands défis quand les Orioles l’affecteront à une de leurs équipes affiliées. Et pourtant, même s’il poursuit ses rêves de devenir joueur de baseball professionnel aux États-Unis, il ne perd jamais de vue son identité de Manitobain et de Canadien. Shaw a concouru sur les équipes nationales juniors de 2011 et 2012 et il a gagné une médaille d’argent au championnat mondial junior à Seoul, Corée du Sud, en 2012. «Je sais que je ne serais pas le joueur que je suis aujourd’hui si je n’avais pas eu cette expérience d’enfiler la feuille d’érable,» a indiqué Shaw. «C’était une phase clé dans ma carrière, et je ne sais s’il existe un moment plus fier que de représenter son pays sur le terrain de jeu.» Quand Shaw habitait à Winnipeg, il passait les longs mois d’hiver à prendre part à une tradition bien canadienne : le curling. Il avait commencé à pratiquer le sport assez jeune, avec ses camarades de classe Derek Harrison, Eric Nugent, Lyndon Walker et l’entraîneur Russ Hinds. L’équipe a concouru au niveau provincial junior et y a trouvé pas mal de succès. Shaw, le capitaine, et ses coéquipiers ont gagné la médaille de bronze aux Jeux du Manitoba d’hiver 2010 et ils se sont qualifiés au championnat provincial masculin junior 2011. Pendant son temps au circuit de curling junior, Shaw croisait souvent un adversaire non seulement sur la glace mais également sur le champ de baseball. Matt Dunstone, capitaine de l’équipe médaillée de bronze au Championnat mondial de curling junior 2013, avait une rivalité amicale avec Shaw durant leur temps sur le circuit provincial junior. Plus souvent qu’autrement, quand il jouait contre Dunstone, Shaw en sortait vaincu. «Et pourtant, un jour je l’ai eu dans une compétition de zone à Winnipeg, au club Pembina. Je crois que je l’ai battu une seule fois sur toute ma carrière. Mais une victoire, c’est tout ce dont j’avais besoin. Pour le reste de ma vie, je peux savourer ce moment,» a dit Shaw en rigolant. Dunstone et Shaw jouaient tous les deux dans des catégories d’âges différentes sur l’équipe Winnipeg South Chiefs. Dunstone a un an de moins que Shaw, mais il a concouru surclassé, aux côtés de Shaw, dans quelques parties ça et là. Et c’était durant ces parties que Shaw s’est rendu compte que son adversaire sur la glace était pas mal comme joueur de baseball aussi. Effectivement, en 2012, Dunstone a été sélectionné joueur midget de l’année de Baseball Manitoba. Shaw voit des parallèles entre les postes de capitaine et de receveur. Le capitaine est le chef de l’équipe et en tant que tel, il a la responsabilité de savoir quels coups on peut potentiellement lancer, et lequel choisir. Il doit savoir le moment opportun pour arrêter le balayage et diriger son équipe en vue de mener à bien le coup. «Je pense que le receveur fait un travail semblable,» a remarqué Shaw. «Il faut comprendre la dynamique de la partie, la situation exacte, et le déroulement des scénarios. En fin de compte, il faut prendre une décision et accepter les conséquences, et il en est de même pour le capitaine d’une équipe de curling.» Il a récolté des trophées et des médailles durant sa carrière de curling, dont notamment sa médaille de bronze aux Jeux du Manitoba d’hiver 2010. À l’époque, il jouait sur l’équipe Winnipeg Gold, dont la contrepartie féminine était représentée par Shannon Birchard, finaliste aux championnats canadiens M&M Meat Shops de curling junior de 2012 et 2013. Il se souvient d’avoir fait la connaissance de toutes sortes d’athlètes manitobains dans le cadre de cet événement, et il se souvient certainement de la victoire 7-4 sur Manitoba Central dans le match pour la médaille de bronze. Ç’aurait été beau d’en sortir avec la médaille d’or, mais une défaite 5-3 dans la demi-finale – aux mains du fameux Dunstone – a mis fin à ce rêve. Quand Shaw rappelle ce match, il ne peut le faire sans penser à Dunstone, un autre fils du quartier Charleswood de Winnipeg qui se fait un nom comme athlète, quoique dans un sport différent. Shaw n’a que de respect pour l’élan et la passion dont fait preuve Dunstone. Or, tout en ayant subi bon nombre de défaites dans ses affrontements avec Dunstone au fil des années, Shaw peut toujours tirer satisfaction du fait d’avoir eu la haute main une fois sur le champion canadien sur la glace du club de curling Pembina.